Jeudi 2 août :
Train pour Nikko. Ce matin,
nous partons à la gare dAsakusa
pour y prendre le train de Nikko. Nous
avions pu laisser pas mal daffaires
à lEnglish house pour nemporter
que mon sac à dos et un sac bleu. Deux
heures de train. Nous arrivons dans une
région assez montagneuse et en plein
orage. Les auberges de jeunesse sont
pleines. Il nous reste le camping.
Nous en atteignons un assez
difficilement en stop ; il est à environ
quarante cinq minutes de marche du centre
de Nikko. Il faut dire que nous
ignorions que le pouce levé soit un
signe inconnu au Japon ; il utilisent l'index
tendu, je crois. Il s'agit d'une
auberge qui fait en même temps camping.
La communication est très difficile avec
les gens de l'auberge, cela énerve dautant
plus Anne-Marie dont la tension ne fait
que monter. Nous plantons quand même la
tente et mangeons nos restes de conserves.
Pour la première nuit sous la tente,
tout le monde dort bien.
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Vendredi 3 août
: Visite de Nikko (voir le plan). Nous
descendons en stop au centre de Nikko,
passons un moment à la poste et allons
finalement visiter ce fameux sanctuaire
Tôshôgu, but principal de notre visite
à Nikko. Nous passons toute la journée
sur le site car cest assez
magnifique, sans pouvoir dailleurs
tout voir. Pas de très beaux jardins,
mais des sculptures et des couleurs
magnifiques. Une cinquantaine dédifices
disposés harmonieusement dans un
environnement darbres majestueux,
la plupart étant de gigantesques cyprès
japonais dont le microclimat dû à l'altitude
aurait favorisé la croissance.
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Une partie du site. |
Mais les monuments, par
leurs sculptures excessivement
détaillées, leurs formes baroques à la
chinoise, leur éclat et leur opulence,
sont aussi peu que possible dans le style
japonais. Ils sont en fait consacrés à
la gloire du fondateur de la dynastie la
plus ferme du Japon : Ieyasu (17ème
siècle). Certaines photos ont été
prises lors d'un déplacement
professionnel au Japon en hiver 1993. J'avais
conservé un tel souvenir de Nikko 14 ans
plus tôt (en 1979), que j'avais proposé
aux collègues de nous y rendre pendant
le Week end. Je vous laisse deviner
lesquelles (les photos), mais n'envoyez
pas de SMS, il n'y a rien à gagner !
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La porteYomeimon. |
Nikko est lendroit
le plus visité de tout le Japon, avant
même Kyôtô, paraît-il. A la fois un
endroit saint, et un gouffre à yens :
un Lourdes japonais, quoi.
Nous y rencontrons les deux français du
transsibérien que nous avions déjà
rencontré à Tokyo ; cest
tout petit finalement le Japon ! Rappel : toutes
les miniatures peuvent être agrandies en
cliquant dessus.
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Détails
et vue sous la neige. |
Les 3 singes de la
sagesse (et du bonheur) sont
représentés sur la porte de l'étable
sacrée (revoir le plan) :
Kikazaru, Iwazaru et Mizaru (le
sourd, le muet et l'aveugle).
Ils signifient selon la secte bouddhique
originelle Tendai que le mal épargnera
toute personne qui respectera les 3
règles suivantes : ne
pas dire ce qu'il ne faut pas dire, ne
pas voir ce qu'il ne faut pas voir, et ne
pas entendre ce qu'il ne faut pas
entendre. |
Les 3
singes. |
Si le sanctuaire
Tôshôgu devint shintoïste avec le
début de l'ère Meiji (1868-1912), le
reste du site garda le bouddhisme. Cela demande explication, et
bien que je sois loin d'être un expert,
je vais m'y essayer si vous le permettez
( ...Personne ne bronche?, bon alors on y
va) :
Antérieurement à
l'introduction du bouddhisme par des
milieux dirigeants au VIème
siècle, le Japon ne connaissait que le
shintoïsme, qualifié rétrospectivement
de 'primitif'. Celui-ci présentait un
panthéon et une mythologie bien
constitués mais restait une religion à
la doctrine faiblement structurée. Il
faudra attendre l'année 712 pour voir
paraître le premier livre du Kojiki, une
sorte de genèse du Japon et de ses dieux,
dont la généalogie est établie depuis
les dieux originaux jusquaux
ancêtres immédiats de la dynastie
royale. Lopération est
explicitement destinée à établir les
droits héréditaires de la dynastie.
Néanmoins, Bouddhisme et Shintoïsme se
développèrent et prospèrent
harmonieusement, jusqu'à ce qu'à la fin
du XIXème
siècle, l'histoire politique et
militaire (tant intérieure qu'extérieure)
du Japon amena alors celui-ci à
développer une idéologie nationaliste
centrée sur les dieux du pays et le
culte de l'empereur, autrement dit sur un
shintoïsme pur et dur. Le terme même de
Kami-kazé (vent divin) en est une
illustration. On sait comment cela a fini
!
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Portiques en bois présents à l'entrée
des sanctuaires japonais.
Gardiens,
divinités ou esprits du monde naturel ?
des Kami ?
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Malgré
la séparation du shintô et de létat
ordonnée en décembre 1945, une
tentation nationaliste revancharde
réapparaît aujourd'hui au sommet de l'état.
Mais ce n'est pas le sujet ici. De nos
jours, adeptes du Bouddhisme et du
Shintoïsme sont en quantités
sensiblement égales au Japon, quand ils
ne sont pas bi-croyants. Après nous en être mis plein
les mirettes, retour au camping sous une
pluie torrentielle.
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Pagode à
étages et moine. |
Samedi 4 août 79 :
Journée excursion. Nous
décidons daller au lac Chuzenji
pour voir un peu de quoi il a lair.
Nous attendons une voiture pendant une
heure environ et la pluie recommence à
tomber. Il faut monter à 1200 mètres daltitude
et la route est très sinueuse. On passe
devant une grande chute deau mais
sans la voir, tellement il y a du
brouillard! Quand nous arrivons au lac,
on ny voit pas beaucoup plus. Alors
il ne reste plus quà manger dans
un wimpy, de faire le tour des boutiques
et de redescendre. La voiture qui nous
redescend nous amène directement au
camping car le gars est cuisinier à lauberge.
Nous ne nous attendions pas à ça car
nous comptions manger en ville. Du coup,
nous commandons deux repas à lauberge.
Mais nous ne savons pas ce quil y a
au menu. Anne-Marie me dit, car elle a
repris du poil de la bête, quavec
la veine quon a, ça va être du
poisson cru. Et pan ! dans le mille.
Heureusement, nous réussissons à
transformer le poisson en côtelettes de
porc !
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Dimanche 5 août
79 : Fête de la danse woraku. Ce
matin, le ciel commence à se dégager.
Nous apprenons que la fête de Nikko que
nous nous proposions daller voir,
ne commence quà dix huit heures.
Si bien que nous avons le temps de
repasser au sanctuaire Toshozu finir de
voir ce que nous navions pas pu
voir, puis de remonter au lac en bus
après plus dune heure de stop sans
succès. Là, nous mangeons dans une
salle, assis sur des tatamis à la
hauteur de petites tables basses. Malgré
cette position, nous apercevons tout de
même le lac, ce qui nous donne envie de
le voir de dessus. Nous louons alors une
barcasse et à force rames, nous
débarquons au temple Chuzenji. Nous navons
le temps que de le regarder de lextérieur
et nous repartons rendre le bateau. Le
stop marche mieux pour descendre. Le gars
nous emmène juste où on voulait aller,
cest-à-dire dans une usine. Car cest
en effet dans une usine de cuivre quà
lieu la célèbre fête de la danse
woraku.
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Une restauration
rapide (fast-food) japonaise. |
Beaucoup de gens sont en
kimono, les uns à carreaux noirs et
blancs, les autres de toutes les couleurs.
Tout est calme, puis à dix neuf heures,
tout sallume et la musique commence.
Une musique très rythmée et monotone
qui nen finit plus. Les danseurs
forment plusieurs cercles autour dun
petit plan deau. Certains dansent
avec art et maîtrise, formant des gestes
parfaits. Dautres (surtout les
hommes) sont très décontractés. Nous
nous nourrissons de ce spectacle ainsi
que de maïs grillé en branche et de
saucisses panées. Nous repartons vers
vingt heures en bus et arrivons à pied
au camping vers vingt-deux heures.
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La danse woraku. |
Lundi 6 août 79 :
La bonne idée. Debout à six
heures trente car il commence à faire
chaud sous la tente. Le temps de faire
sécher et de plier celle-ci, nous
partons avec lidée de rejoindre
Kyoto en stop. Pour ceci, nous
redescendons au centre de Nikko. Nous
téléphonons de la gare à une autre
agence de voyage qui propose un Tokyo-Paris
par lAéroflot à 168 000 yens.
A un moment, je dis à Anne-Marie : " Tiens,
il y a un 'Rent a Car' en face ".
Une heure plus tard, je suis au volant (qui
est à droite, vu que l'on roule ici à
gauche) dune superbe Nissan louée
pour six jours au prix de 37 000 yens.
Nous filons sur Numata en repassant par
le lac Chuzenji puis d'autres lacs. Jusquà
Numata, pas de problème, les
panneaux routiers sont sous-titrés,
mais c'est après que les ennuis
commencent. Nous nous retrouvons sur la
mauvaise route en pleine vallée
industrielle, ce qui fait que sur des
kilomètres et des kilomètres nous nous
traînons à trente km/h. De toute façon,
toutes les routes du coin sont limitées
à quarante km/h.
Nous couchons le soir dans la voiture
un peu après Annaka.
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Mardi 7 août 79 :
le château de Matsumoto. Nous
rejoignons Ueda, puis Matsumoto où nous
nous arrêtons pour visiter son château
de 1592. Entouré de douves, il se
trouvait au centre d'une ligne de
défense du Japon.
Nous continuons par une route vraiment
impossible jusquà Takayama. La
montagne est très belle, encaissée et
nous sommes parfois obligés dattendre
une demi-heure quun camion arrive
à se dégager. Nous sommes dans ce quils
appellent les alpes japonaises.
Dommage que le soleil ne soit pas
toujours de la partie !
À Takayama, lauberge de
jeunesse est complète en ce qui concerne
les femmes. Nous y prenons tout de même
un bain mais sommes obligés de
déguerpir en vitesse car on nous cherche
des histoires : des personnes de lauberge
qui nétaient dailleurs pas
là quand on avait besoin delles.
Il nous avait fallu plus dune demi-heure
pour savoir quil ny avait pas
de place pour Anne-Marie et pas
moyen de savoir qui était vraiment le
responsable, parmi ces cinq ou six gus
qui restaient debout devant nous sans
réagir. Nous redescendons au centre
ville pour y manger et flâner, il y
avait encore une fête avec des danses et
la rue principale était toute éclairée.
Nous couchons dans la voiture mais
cette fois-ci dans lautre sens en
se faisant de grands coussins sous nos
têtes.
Après Nikko, Matsumoto propose
également des tampons rouges du lieu,
avec lesquels j'ornemente mon carnet. Ce
sera le cas dans tous les sites
touristiques suivants. Ce serait peut-être
à suggérer à notre ministère du
tourisme...
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Son donjon est muni de
postes de tir.
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Mercredi 8 août
79 : Le long de la rivière Nagara. Aujourdhui
encore nous traversons une région
vraiment merveilleuse. Après sêtre
un peu trompés de route, ce qui nous a
permis de voir un beau lac artificiel et
dacheter des ombrelles en papier,
nous suivons la rivière Nagara où une
enfilade de pêcheurs, chapeaux chinois
sur le chef, surveillent la truite. À
midi, nous mangeons sur le pouce en
trempant nos pieds dans leau. Nous
narrivons pas à avancer beaucoup
plus vite quhier, si bien que le
soir, nous nous retrouvons à encore
cinquante kilomètres de Kyoto.
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